Le paradoxe Portgentillais

Article : Le paradoxe Portgentillais
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17 novembre 2012

Le paradoxe Portgentillais

  « L’argent du pétrole est maudit » Voilà la phrase qu’on entend ici régulièrement si on vit dans les quartiers populaires. Pourquoi une telle affirmation ? Pour justifier un non-sens, un contraste. Le paradoxe de la ville qui veut que nombre de ces citoyens vivent au bord de la misère ou de la simple décence alors même qu’ils ont des salaires importants. Lorsqu’on entend parler de Port-Gentil, plusieurs mots reviennent : pétrole, argent, vie chère. Tous les jeunes, voire tous les hommes ne souhaitent travailler que sur site, c’est-à-dire, les plateformes pétrolières en offshore ou onshore. La raison ? L’argent (les Pétro-CFA).
Les Pétro-CFA sont dans l’air. Ils se cristallisent en un ego commun. En dehors d’eux, il n’y a rien. Si vous parlez d’autres vocations vous êtes considérés comme du mouchoir jetable. Si cet hydrocarbure est une chance pour certains, il est aussi un malheur, une guigne ! Il ne produit que peu de choses dans la vie d’un bon nombre de Port-gentillais. Bien sur, certains en tirent bénéfice et ces spécimens-là, on les trouve chez les cadres supérieurs et moyens Gabonais, les expatriés Occidentaux et Ouest-africains, autant dire la minorité. La majorité des Portgentillais travaillent sur site pétrolier ou sur les barges en mer. Ils touchent de gros salaires, habitent de véritables taudis, oscillent sans cesse entre l’insécurité alimentaire et la suralimentation. La chose est saisissante. Et le décor est loin d’être paradisiaque.
Je côtoie chaque jour ses compatriotes qui, se flattant de cet ego commun s’expriment en ces termes : « À. Port-Gentil, on a l’argent ! On a le pétrole ! Le reste ce n’est pas notre affaire ». Le reste ? De quel reste parle-t-on ? De la famille ? De la santé ? De l’environnement ? Des études ? C’est paradoxal si on ajoute la série de plaintes qu’ils expriment de temps en temps contre l’autres : le Blanc. Il n’y a pas de racisme dans ces propos. Il y a juste la faim soudaine d’un autre ordre de vie lorsque les limites de l’argent en abondance se font voir. C’est un vœu à peine formulé. Un besoin éphémère d’Union, de Travail et de Justice pour tous.

Ces Portgentillais pleins de ressources vivent les pieds dans l’or noir, les mains dans du bon riz popo(Tin) et la tête dans un horizon illusoire. C’est pourquoi leur réalité change d’apparat une fois que le soleil se lève et que les filles font le défilé de Jean Slim. Les causes de ce paradoxe sont multiples. Il y a les insuffisances de l’État au niveau de l’éducation, de l’urbanisation, de l’harmonisation des prix des produits de première nécessité. Il y a les plaisirs faciles qu’offrent les Pétro-CFA. Et cela se mesure au nombre de motels fréquentés en 28 jours de repos, au nombre de bières consommées et au « farotage » façon bling-bling. L’ego commun, c’est aussi ces voitures louées pour quelques jours de groove non stop pour épater les filles. L’ego commun, c’est avoir la dernière tablette tactile alors qu’on ignore totalement son utilisation ; c’est avoir le dernier I-phone et ne même pas savoir comment changer les paramètres de langue. L’ego commun nourrit le paradoxe Porgentillais et bien souvent, laisse famélique femmes et enfants. Ça, c’est vraiment les choses de mon corps.

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